Après l’Assemblée nationale, le Sénat : quel avenir pour la Santé au travail ?

Point d'interrogation 3C’est le 17 mai (c’est-à-dire demain) que se poursuivra le feuilleton du « projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs », plus connu sous le nom de projet de loi El Khomri, avec l’audition de Madame la Ministre en personne par la Commission des Affaires sociales du Sénat.

Elle sera suivie, le 18 mai, par celle des représentants des Organisations représentatives des salariés, et, le 25 mai, par celle des représentants des Organisations représentatives des employeurs. Les débats en séance publique débuteront le 13 juin, selon le calendrier annoncé sur le site du Sénat, après l’examen par la Commission des amendements présentés par les Sénateurs, qui promettent d’être nombreux…

Pour quelle issue ? Il y a fort à parier que le Gouvernement voie son texte taillé en pièces par une opposition qui entend profiter de ce débat pour présenter une politique alternative, c’est-à-dire celle qu’elle entend proposer après les élections présidentielles de 2017, dans l’hypothèse (prévisible) d’une alternance.

Quid, dans ce projet de substitution, des dispositions relatives à la Santé au travail ? Mystère pour le moment mais il n’y a rien d’étonnant à cela. Le « mystère » est en effet ce qui caractérise aujourd’hui le mieux la réforme de la Médecine du travail…

Ainsi, renseignements pris aux sources les mieux informées, tant du côté patronal que syndical, le changement des règles de gouvernance dans les Services de Santé au Travail Interentreprises (SSTI), décidé en catimini, à la dernière minute, juste avant l’adoption sans vote ni débat grâce à l’article 49-3, demeure une énigme. Pire, il semble même que la Direction générale du travail elle-même ait été prise au dépourvu, ce qui en dit long sur le degré de communication entre les Pouvoirs publics et l’Administration…

Sans doute en saurons-nous plus dans les prochains jours car j’imagine mal que les Organisations représentatives des employeurs demeurent inactives face à un changement remettant radicalement en cause le pouvoir qu’elles exercent (pratiquement) sans partage depuis 70 ans à la tête des Services de Santé au travail…

La question est de savoir si le lobbying intense qui a probablement commencé à s’exercer dès la semaine dernière auprès des Sénateurs, des Députés et du Gouvernement lui-même permettra de revenir sur un choix certes inattendu, mais dont on ne peut pas croire qu’il ait été irréfléchi.

On peut en déduire deux conclusions opposées : soit ce « choix » est confirmé et c’en sera fini du modèle français de Médecine du travail créé en 1946, avec des conséquences en cascade dont je ne suis pas certain que toutes les conséquences aient bien été mesurées par les « décideurs » ; soit il est infirmé et c’est la crédibilité même de l’Etat qui sera une nouvelle fois atteinte …

Pas de quoi se réjouir, quelle que soit l’hypothèse retenue, car avec ou sans évolution de la Gouvernance des Services, les autres dispositions du projet de loi El Khomri visant à « moderniser la Médecine du travail » sont telles qu’à elles seules, elles peuvent suffire à anéantir le système.

Gabriel Paillereau
Copyright epHYGIE 16 mai 2016
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