Le coût exorbitant de la pollution

Vingt-cinq villes européennes économiseraient, à elles seules, 31,5 milliards d’euros par an en respectant les recommandations de l’OMS.

C’est une facture pour le moins salée qui devrait faire réfléchir bien des décideurs publics. Le dépassement du niveau moyen annuel de particules fines recommandé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) – soit 10 microgrammes par mètre cube – relevé dans l’air de 25 grandes villes de 12 pays européens coûterait chaque année 31,5 milliards d’euros  en dépenses de santé, journées de travail perdues pour cause de maladie et coûts associés à la perte de bien-être, de qualité et d’espérance de vie. C’est du moins ce qu’ont déterminé les 60 scientifiques européens du projet Aphekom qui ont mené trois années de travaux, de juillet 2008 à mars 2011, sur les impacts sanitaires de la pollution atmosphérique.

Côté santé publique, les chercheurs sont également parvenus à quantifier les effets d’une mauvaise qualité de l’air en termes d’espérance de vie. Ainsi, ramener le taux moyen annuel de particules fines aux 10 microgrammes par mètre cube recommandés par l’OMS pourrait faire gagner jusqu’à 22,1 mois – soit pratiquement 2 ans – d’espérance de vie aux Roumains* vivant à Bucarest (ville la plus polluée des 25 métropoles européennes étudiées), 7 mois et demi aux Marseillais*, 5,8 mois aux Lillois* et aux Parisiens*, 5,7 mois aux Lyonnais* et aux Strasbourgeois*, 5 mois aux Bordelais* et entre 4,6 et 3,6 mois aux habitants de Rouen*, du Havre* et de Toulouse*.

Progrès

L’étude montre également que les personnes les plus fragilisées sont celles résidant près d’un axe de circulation important. Ainsi, la proximité du trafic routier pourrait être responsable de 15 à 30 % des asthmes de l’enfant et de la même proportion de pathologies chroniques respiratoires et cardiovasculaires fréquentes chez les plus de 65 ans. Des maladies dont la prise en charge représenterait en moyenne sur un an et pour chaque ville près de 30 millions d’euros.

Ce tableau plutôt sombre pourrait donner envie de fuir l’air pollué des villes pour s’installer à la campagne… Pourtant, l’étude Aphekom montre également qu’il n’y a pas, en la matière, de fatalité. Ainsi, les chercheurs relèvent que la législation européenne visant à réduire les niveaux de soufre dans les carburants a permis une diminution nette et durable du dioxyde de soufre dans l’air ambiant et aurait permis, du même coup, de prévenir près de 2 200 décès prématurés, dont le coût est estimé à 192 millions d’euros dans les villes étudiées.

De quoi encourager toutes les mesures destinées à limiter la pollution des villes, qui, même si celles-ci demandent des investissements importants dans un contexte de réduction des dépenses publiques, pourraient être rapidement rentabilisées.

(*Gain d’espérance de vie calculé pour les personnes âgées de 30 ans)

Chloé Durand-Parenti

Le Point.fr – Publié le 03/03/2011