Santé au travail : appliquer la nouvelle réglementation sur les SMR, une nécessité, mais à quel prix ?

Nous avons à plusieurs reprises critiqué les nouvelles dispositions applicables en matière de Surveillance Médicale Renforcée (SMR). Notre avis, largement corroboré depuis, demeure inchangé à ce jour, faute de prise de conscience par les Pouvoirs Publics de la régression créée par la réforme, ou, ce qui est plus juste, faute de volonté politique de remettre en cause les nouveaux textes en la matière.

En dépit de leurs lacunes avérées, ils s’imposent donc aux professionnels de la Santé au travail, et plus particulièrement aux Médecins du travail, condamnés à « faire avec », ce qui nécessite évidemment qu’ils en aient une bonne connaissance.

C’est sous cet angle que le dossier publié sur le site d’AST 67, Service interentreprises de Santé au travail du Bas-Rhin, descriptif et parfaitement documenté (comme le sont d’ailleurs tous les dossiers mis en ligne sur ce site), doit constituer pour eux une aide précieuse.

Ce satisfecit étant exprimé, il n’est pas interdit de s’interroger et de se demander en particulier si, à la lumière des informations données, ils ne seront pas de facto mis en situation de « bien appliquer un mauvais texte », avec des conséquences non négligeables à la clé.

Cette présentation n’est pas sans rappeler, dans un cadre différent, les propos tenus par Davor Komplita lors du Colloque « Manager la Santé au travail par temps de crise » : de plus en plus de professionnels de la Santé au travail ne sont-ils pas condamnés à ce qu’il appelle « l’obéissance déloyale » (on respecte scrupuleusement les consignes, sachant que cela ne va pas fonctionner, mais tant pis), appliquant des textes dont on sait ou dont ils savent qu’ils sont inadaptés, la SMR n’étant qu’un exemple parmi d’autres.

Ce faisant, et même si leur « légalisme » est sans faille, ce qui, à leurs yeux au moins, les met théoriquement à l’abri de toute mise en cause d’ordre juridique, ne prennent-ils pas et ne font-ils pas prendre des risques aux Salariés qu’ils suivent et à leurs Employeurs ?

  • d’une part, l’obligation de sécurité de résultat née en février 2002 des « Arrêts Amiante » semble en effet n’avoir pas servi de leçon ;
  • d’autre part, la possible mise en examen de Martine Aubry, précisément dans le cadre de l’amiante, est là pour montrer qu’il ne suffit pas d’appliquer la loi s’il est patent (et/ou si la Justice estime) que celle-ci est en retard par rapport aux connaissances scientifiques.

On peut ajouter que si nul n’est « censé » ignorer la loi, justification jugée traditionnellement nécessaire et suffisante à sa mise en application, cette dernière étant alors généralement considérée comme une « protection » sûre, il est aujourd’hui de plus en plus évident que nul Professionnel n’est « censé » ignorer l’état des connaissances scientifiques dans son domaine (et tout spécialement dans celui de la Santé) : la protection que le respect de la Loi est « censé » apporter en contrepartie n’est plus alors qu’une illusion, et la solide cotte de maille se révèle n’être qu’un bouclier en carton…

Sans doute était-ce vrai « avant », mais ça, c’était avant !

Et on voit très bien, à la lumière de l’actualité la plus récente, où cela pourrait conduire…

Gabriel Paillereau

Copyright epHYGIE octobre 2012

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  • Pour accéder au dossier technique d’AST 67, « La surveillance médicale renforcée », cliquer ici

 

2 Comments

Henri

Hello !

Je trouve ce billet très partial et très péremptoire mais sans jamais apporter de véritable argument. Qu’apporte-t-il au lecteur ?

Bye.

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g.paillereau

Vous êtes totalement libre de penser que ce billet est partial ou péremptoire : c’est le fondement même de la liberté d’expression.
Quant aux arguments, qui, selon vous, feraient défaut, la réalité de ce que vivent de nombreux professionnels de la Santé au travail en est un premier ; il suffit de les interroger pour le savoir. L’obligation de sécurité de résultat qui pèse sur les Employeurs depuis 2002 en est un deuxième, et, pour faire bonne mesure, le fait que le Juge s’appuie de plus en plus sur l’état de la science pour apprécier la travail des Professionnels en est un troisième, tout à fait déterminant.
A moins, bien évidemment, de considérer l’évolution de la Jurisprudence comme accessoire.
Le lecteur peut, à partir de ce billet, découvrir précisément des « arguments » qui lui viennent d’autant moins facilement à l’esprit que tout est mis en oeuvre pour lui ôter sa liberté de jugement.
Je crois aux vertus de la confrontation d’idées et je me méfie du « prêt à penser » qu’on voudrait nous imposer en prenant appui sur un discours « politiquement correct » tout à fait discutable.
Le fait est que les lieux où peuvent s’exprimer des points de vue « différents » sur la Santé au travail sont plutôt rares : epHYGIE est un de ces lieux et j’en suis très heureux.
A chacun ensuite de se faire sa propre opinion.
GP

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