Santé au travail : après le Marché du travail, la Qualité de Vie au travail bénéficiera-t-elle aussi d’un accord « historique » ?

On l’avait annoncé depuis des mois. On a douté de sa conclusion jusqu’à la toute dernière minute ou, du moins, on a fait mine de croire qu’il n’aurait pas lieu en raison du refus obstiné du MEDEF de céder sur la taxation des contrats de courte durée, ce qu’il a fait in extremis.

On a donc un « accord » des Partenaires sociaux sur la transformation du marché du travail. Accord qualifié d’historique par nos Gouvernants avant même sa conclusion, accord considéré comme gagnant-gagnant et équilibré par les Organisations patronales (plus divisées qu’on ne l’a dit), accord jugé de façon beaucoup plus contrastée par les Organisations syndicales (texte d’accord ambitieux pour l’emploi et les salariés pour la CFDT, grave régression des droits sociaux pour la CGT) et même par des leaders de l’aile gauche du parti socialiste.

Qui croire ?

Une première chose est sûre pour qui a déjà conduit des négociations au niveau national : la concession faite « au bout du bout » était totalement prévisible : le MEDEF ne pouvait pas prendre le risque d’un non-accord, il devait donc « lâcher du lest », mais suffisamment près du « coup de sifflet final » pour ne pas avoir à affronter de surenchères de la part d’Organisations syndicales, elles aussi majoritairement désireuses que soit sifflée la fin de la partie…

La présentation des « avancées » du texte pour les Entreprises et pour les Salariés vise à prouver leur « équilibre ». Seul l’avenir nous dira ce qu’il en est exactement : tout dépendra en effet, d’une part, de la transcription qu’en feront les Députés et le Sénateurs (qui ne sera pas forcément une partie de plaisir), d’autre part, une fois la loi votée, de l’esprit dans lequel elle sera appliquée… On sait en effet qu’il existe une multitude de moyens permettant de contourner une loi.

Il faudra donc nous montrer patients mais, dans l’intervalle, nous pourrons très vite nous faire une idée de la sincérité des engagements pris, à travers une autre négociation, engagée elle aussi à l’automne 2012 dans la foulée de la « Grande Conférence sociale » de juillet : celle concernant la Qualité de Vie au Travail (QVT). Nous savons en effet qu’un terme a été mis à cette négociation à la fin de 2012, dans l’attente de la conclusion de celle sur la transformation du marché du travail. Nous nous en sommes fait l’écho dans 2013, année de vérité pour la Santé au travail ?, dans les termes suivants :

Aussi, alors qu’il est d’usage de faire des vœux pour l’année à venir, on peine à être optimiste pour la Santé au travail, plombée par les arrangements et les calculs des uns et des autres et emprisonnée dans les discussions entre partenaires sociaux sur la Qualité de Vie au Travail, annoncées lors de la Grande Conférence sociale de juillet et dont nous avons appris récemment qu’elles avaient été différées, les Organisations patronales souhaitant régler au préalable la transformation du marché du travail, comme en témoigne le report de la réunion du 21 décembre, stigmatisé par la CGT dans un Communiqué mis en ligne sur son site : Qualité de vie au travail, Comportement dilatoire du MEDEF !

Dans ce Communiqué, la CGT indiquait : « la réunion de négociation sur la qualité de vie au travail et l’égalité professionnelle prévue ce 21 décembre a été annulée, sans aucune proposition de date ultérieure. Le Medef prétexte que la conclusion de la négociation sur la sécurisation de l’emploi doit être priorisée. La CGT a toujours dit que ces deux négociations étaient liées. Et la stratégie du MEDEF est claire désormais : flexibiliser encore davantage et précariser avant de traiter des enjeux du travail, de l’organisation du travail et de l’égalité salariale et professionnelle entre les femmes et les hommes. »

La CGT avait-elle raison ou tort ? On le saura très vite désormais : côté Organisations patronales, plus rien en effet ne devrait s’opposer à la reprise des négociations sur la QVT ; quant aux Organisations syndicales, elles ne peuvent que souhaiter qu’elle ait lieu dans les meilleurs délais.

Reprise rapide, oui, mais avec quelle ambition et pour quels résultats ? Ce sont là des questions cruciales ; on peut même aller jusqu’à dire que c’est à l’aune du déroulement de cette nouvelle négociation et des décisions auxquelles elle aboutira que l’on sera vraiment en mesure de porter un jugement sur l’Accord de la semaine dernière. Accord historique ou marché de dupes ? Point de départ d’un renouveau du travail et des relations entre Employeurs et Salariés ou simple étape dans le détricotage de l’existant ?

En conclusion de son Communiqué du 12 janvier, reproduit ci-dessous, le Premier Ministre, Jean-Marc Ayrault considère, lui, que cet Accord « est l’aboutissement d’une négociation, mais aussi le début d’un processus. Ce succès invite à poursuivre les chantiers prévus en matière de dialogue social par la conférence sociale comme la négociation sur la qualité de vie au travail et l’égalité professionnelle, à laquelle le Premier ministre est profondément attaché. »

On aimerait le croire…

Il s’agit en tout cas d’un dossier essentiel pour l’avenir de la Santé/Sécurité du travail, que nous suivrons évidemment de très, très près.

Gabriel Paillereau

Copyright epHYGIE janvier 2013

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Pour accéder au texte de l’Accord, cliquer sur le lien ci-dessous :

On trouvera ci-dessous les liens vers quelques-uns des nombreux articles et déclarations permettant d’y voir (un peu) plus clair sur l’Accord signé par les Partenaires sociaux, en attendant les innombrables commentaires qu’il ne manquera pas de susciter dans les prochaines semaines :

Du côté des Pouvoirs publics

Du côté des Organisations patronales

Du côté des Organisations syndicales

Dans la Presse

 

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