Santé au travail : une réforme qui ne satisfait pratiquement personne (GP : chronique actuEL-HSE)

On trouvera ci-dessous le texte de la chronique mise en ligne sur le site actuEL HSE le 18 avril 2012 :

Gabriel Paillereau a fondé le cabinet de conseil en santé au travail epHYGIE. Bon connaisseur des arcanes des services de santé au travail en France, il dresse le constat suivant : la réforme de la médecine du travail ne satisfait personne ou presque.

Début 2011, la réforme de la Santé au travail semblait enterrée. C’est donc contre toute attente que, fin mai 2011, l’annonce fut faite d’une loi avant l’été. Une loi fut effectivement promulguée le 20 juillet 2011. Suivaient les décrets du 30 janvier 2012, pour une application de la réforme prévue  au 1er juillet 2012.

Cela n’empêche pas certains services de santé au travail, depuis plusieurs mois et même parfois beaucoup plus (c’est-à-dire avant même le vote de la loi), d’appliquer la « réforme de la santé au travail », en dépit de la date d’application fixée par les textes et des multiples zones d’ombre qu’elle comporte.

Une réforme critiquée de toutes parts

C’est une bien curieuse réforme que nous nous préparons à vivre… Employeurs, salariés, services de santé au travail, professionnels, presque tous ont de bonnes raisons de la critiquer.

Les organisations d’employeurs, à de très rares exceptions près, éprouvent « une satisfaction discrète ». Or, objectivement, les nouveaux textes épousent très largement leurs vœux en se calant sur les propositions du Medef, refusées par les organisations syndicales fin 2009.

Ces dernières, précisément, apparaissent aujourd’hui divisées sur le sujet : divisées entre elles à l’extérieur et parfois en interne également. Contre la réforme : la CFTC, la CGC et la CGT-FO. Pour la réforme : la CFDT et la CGT, qui viennent de s’en expliquer dans un courrier commun publié dans le dernier numéro de la revue Santé et Travail. Oui mais… Pour ne donner qu’un exemple, la CGT du livre vient de rendre publique une position en contradiction avec la position confédérale.

Y compris par les médecins du travail…

Côté médecins du travail, le temps est rarement à la satisfaction, le plus souvent à la résignation, à la déception, voire à la colère. S’agissant de leurs organisations représentatives, les points de vue exprimés par la CFTC, la CGC, la CGT-FO et le SNPST, soit quatre syndicats sur six, sont très clairs : en dépit de quelques avancées, la réforme est considérée comme n’apportant pas de réponse aux principales questions, aptitude en tête.

Même constat général du côté des IPRP, dont le statut n’a pas été amélioré par la réforme, même si le développement de la pluridisciplinarité, dont on doit se féliciter, ne peut que les satisfaire, ou du côté des Infirmiers en santé au travail, qui ont vu disparaître la perspective d’un diplôme national au bénéfice d’une formation aux contours flous…

Et les services de santé au travail

Du côté des services autonomes de santé au travail, peu ou pas de réactions : il est vrai que les textes leur sont très favorables puisque, globalement, ils ne remettent pas en cause leurs pratiques actuelles. Du côté des services interentreprises, alors que certaines dispositions de la loi ne réjouissent pas leurs responsables, en matière de gouvernance notamment, on a choisi de faire profil bas en espérant que rien ne vienne troubler des lendemains qu’on veut croire sereins.

On pourrait encore ajouter les positions du Conseil national de l’Ordre des médecins et des enseignants en médecine du travail, tout aussi contradictoires ou contrastées, ou celles encore d’éminents juristes, comme Marc Véricel, pour qui « on peut donc craindre que ce soit, en quelque sorte, une loi pour rien »…

Et les salariés ? Tout se passe comme si la réforme prenait pleinement en compte leurs intérêts. On peut en douter, hélas. Ne risque-t-on pas, à très brève échéance, de découvrir la nécessité d’une réforme de « la réforme de la réforme ».

Gabriel Paillereau

Copyright actuEL HSE/epHYGIE avril 2012

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