L’annonce faite par Bruno Dupuis à l’occasion du Congrès de Santé au travail du BTP, il y a tout juste deux semaines, m’avait beaucoup surpris. J’avais souligné aussitôt, dans un article mis en ligne sur le site, que, deux jours plus tôt, l’hypothèse d’un examen de la proposition de loi du Sénat avant l’été apparaissait exclue…
Curieux revirement…
Les événements ont paru s’accélérer, avec les auditions réalisées par Guy Lefrand, Rapporteur du texte, entre le mardi 7 et le vendredi 10 juin, avant la réunion de la Commission des Affaires sociales, prévue le 15 juin, à 10 heures. J’ai rendu compte de la situation dans un nouvel article, toujours très réservé sur la suite…
Bien m’en a pris, puisque la perspective que la proposition de loi soit examinée le 27 juin s’est évanouie ces dernières heures, avec la publication de l’Ordre du jour de l’Assemblée Nationale, dont on connaît le détail jusqu’au 30 juin prochain.
On n’y trouve aucune trace de la proposition de loi sur la « réforme de la médecine du travail »…
Curieux revirement…
Alors, quel calendrier aujourd’hui ? Selon les informations dont j’ai eu connaissance, le texte serait éventuellement examiné dans le cadre d’une semaine de priorité gouvernementale, un nouveau « créneau législatif » pouvant être libre en juillet.
Pour comprendre ce que cela signifie, il faut savoir que l’article 48 de la Constitution répartit chaque séquence de quatre semaines de séances de l’Assemblée Nationale (hors périodes de suspension des travaux) entre deux semaines de priorité gouvernementale, une semaine réservée par priorité au contrôle et à l’évaluation des politiques publiques et une semaine d’ordre du jour fixé par chaque Assemblée.
Le Gouvernement se réserve en principe les deux premières semaines de chaque séquence.
En clair, le Gouvernement pourrait utiliser une « semaine de priorité gouvernementale » pour que le texte soit examiné par l’Assemblée Nationale (au mieux dans la première quinzaine de juillet, conformément aux règles rappelées ci-dessus).
La question est de savoir, d’une part, si la réforme de la Santé au travail est jugée suffisamment importante actuellement par le Gouvernement pour être examinée dans ce cadre, d’autre part, si d’autres textes ne seront pas jugés plus prioritaires.
Il va de soi que cette double interrogation ira probablement crescendo, jusqu’à la prochaine élection présidentielle, pour toutes les semaines de priorité gouvernementale…
Du coup, pour en savoir davantage, on est condamné à attendre de découvrir la suite du calendrier des travaux de l’Assemblée Nationale, qui sera fixé par la Conférence des Présidents, organe compétent pour préparer l’organisation du travail de l’Assemblée nationale en séance publique (au cours de sa réunion hebdomadaire, la Conférence examine l’ordre des travaux de l’Assemblée pour la semaine en cours et les deux suivantes), après l’examen du Rapport n° 3120 sur « l’organisation de la médecine du travail » par la Commission des Affaires sociales, le mardi 15 juin prochain.
En tout état de cause, quelle que soit la date finalement retenue (s’il y en a une), la procédure à suivre est totalement « bordée » par le règlement de l’Assemblée.
Le recours aux procédures particulières d’adoption prévues par la Constitution, procédure d’examen simplifié, « vote bloqué » et engagement de responsabilité du Gouvernement sur le vote d’un texte, est exclu selon moi, en raison de l’absence de caractère « stratégique » de la réforme de la Santé au travail…
Si l’examen de la Proposition de loi a bien lieu, ce sera donc dans le cadre de la procédure normale.
On peut parier sans grand risque que, dans ce cadre, les Députés modifieront la proposition de loi adoptée par les Sénateurs (en remettant notamment en cause le paritarisme avec Présidence alternante), ce qui engagera le recours à la procédure de conciliation, à travers la Commission Mixte Paritaire, comme lors de l’examen du premier projet de réforme, alors porté par Guy Lefrand et un groupe de Députés de l’UMP.
Tout dépendra de l’issue de cette procédure de conciliation…
En cas d’échec, après une nouvelle navette entre l’Assemblée Nationale et le Sénat, le Gouvernement aurait la possibilité de donner le dernier mot à l’Assemblée nationale…
Il ne s’agit pour l’heure que de « politique fiction », mais, quoi qu’il se passe demain, on reste confondu devant l’apparent cafouillage actuel et l’annonce de la date du 27 juin, visiblement imprudente (mais est-ce bien le cas ?), relayée sans la moindre réserve par certains comme étant sûre, alors que, de toute évidence, il fallait faire preuve de circonspection…
Une conclusion s’impose : ces péripéties révèlent le peu de respect que semble inspirer la Santé au travail, ce qui est affligeant.
Une question aussi : à quand le prochain revirement ?
Gabriel PAILLEREAU
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