Conséquences de la pénurie de médecins du travail : un « cas d’école »

Les lignes qui suivent, extraites d’un article publié dans le Journal de la Haute-Marne du mercredi 20 avril 2011, en disent plus qu’un long discours sur les difficultés auxquelles sont confrontés certains Services et les solutions que leurs responsables s’efforcent de mettre en œuvre, sans vraiment parvenir à être compris…

Je tiens à souligner que le problème de pénurie dont souffre le Service n’est pas tout à fait nouveau puisque c’est en septembre… 1987 que je me suis rendu à Chaumont pour la première fois (j’y suis retourné à de nombreuses reprises depuis, et la dernière fois à la fin du mois de novembre 2008, pour y animer l’Assemblée générale : voir article JHM du 28 novembre 2008) afin d’étudier les difficultés auxquelles le Service était confronté, dans le secteur de Saint-Dizier en particulier…

GP

Santé au travail : hypertension chronique

De manière récurrente, la santé au travail suscite attaques et contre-attaques : plantons la partie visible du décor : la Haute-Marne commence à manquer de médecins généralistes. Certains cantons vont même en chercher en Roumanie. Reflet de son territoire, l’ex-médecine du travail a elle aussi dû faire face à une pénurie de praticiens. Plutôt que de fermer ses portes – ce qui aurait pénalisé les petites entreprises, elle s’est adaptée, devenant “santé au travail”. Le nouveau système met l’accent sur la prévention. Les rencontres salarié-médecin sont largement espacées dans le temps (3 ou 4 ans). Des infirmiers ayant suivi une formation adaptée reçoivent les salariés ; des spécialistes de la prévention interviennent et préconisent en entreprise. Un accord encadrant ce nouveau dispositif a été signé au niveau régional et validé au niveau national. Certaines entreprises haut-marnaises (pour faire court, les plus grosses, souvent dans la métallurgie, souvent du nord du département), déjà contraintes, de par leur taille, d’avoir un infirmier dans leurs murs, ruent dans les brancards : pourquoi payer à nouveau une prestation d’infirmier à la santé au travail ?

La bergère attaque

Dans ce contexte d’hypertension chronique, le délégué général du Medef-52 adresse au début de ce mois une missive brûlot à ses adhérents ; on y lit : « Depuis le 5 janvier, date à laquelle nous avons remis une liste de points à discuter, le service de Santé au travail est resté silencieux. Nous sommes toujours dans l’attente d’un rendez-vous pour travailler sur le sujet malgré nos relances. « Certaines entreprises ont fait part de leur étonnement quant à l’augmentation de la cotisation. Nous tenons à vous rappeler que le Conseil d’administration de cette organisation est composé d’administrateurs patronaux, siégeant à titre de cotisants. Ils ne représentent pas nos organisations professionnelles patronales. […] Les organisations patronales demandent à être représentées en tant que telles, avec une majorité de sièges dans les conseils d’administration et non comme actuellement au titre d’entreprises particulières, et ce, afin de peser efficacement sur les débats incluant ce type de sujet. La crainte est que la parité avec les organisations syndicales de salariés soit instituée, auquel cas nous demandons que la présidence patronale ait voix prépondérante. Concernant les entreprises de plus de 200 salariés, la législation impose d’avoir un(e) infirmier(ière) à temps complet. Cette personne effectue habituellement tous les entretiens préalables à la visite du médecin du travail et est donc tout à fait en mesure d’assurer les entretiens infirmiers que se propose de faire le service de Santé au travail. Il va de soi que les entreprises qui ont l’obligation légale d’avoir du personnel infirmier ne peuvent accepter que ce personnel ne soit pas impliqué dans l’accomplissement de sa mission traditionnelle. […] « L’intervention du personnel infirmier du service de santé au travail n’aurait à notre avis de sens que dans une étroite collaboration avec le personnel infirmier de l’entreprise pour assurer la liaison avec le médecin du travail. » Le ton est donné !

Le berger répond…

Le président de la Médecine du travail pose un regard gourmand sur la lettre de Jean-Marc Testot. Sa directrice, Christine D’Hondt, rappelle les faits, rouvre les dossiers : « Ici, on est dans les clous et la transparence est totale », explique-t-elle. « Notre accord est désormais appliqué dans cinq services en France. Ailleurs, certains emploient des médecins qui ne sont pas diplômés en santé au travail ». Christine D’Hondt rappelle que tous les trois mois « on réunit le comité de pilotage au sein duquel siègent des représentants des employeurs. Ce comité surveille la mise en œuvre de ce que prévoit notre accord ». François Jehlé, malicieux, d’ajouter : « Le conseil d’administration, duquel fait partie le délégué général du Medef, vérifie aussi tout cela ». Officiellement, le président Jehlé affirme que, tout étant vérifié par tout le monde et validé par les plus hautes autorités, « on ne comprend pas la remise en cause de l’accord ». Aux détracteurs du nouveau dispositif qui expliquent qu’ils ne veulent plus payer aussi cher qu’avant, parce qu’il n’y a plus de médecins, Christine D’hondt répond qu’elle a remplacé quatre médecins par dix intervenants. François Jehlé rappelle aussi les fondamentaux : « Nous ne sommes pas une entreprise mais une association d’employeurs haut-marnais qui se réunissent pour appliquer la loi. Nous ne gagnons pas d’argent ; nous faisons en sorte que les salariés de nos adhérents bénéficient de meilleures conditions de travail. Finalement, ce sont les salariés qui pâtissent des bâtons que certains mettent dans nos roues ».

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