Déjà engagée depuis plusieurs années, à Toulouse et Montauban, avec la folie meurtrière d’un Mohamed Merah assassinant de sang-froid des enfants dans une cour d’école, la montée en puissance de la barbarie semblait avoir atteint une forme de paroxysme avec la tuerie de Charlie Hebdo et celle du magasin Hyper Cacher de la porte de Vincennes à Paris.
L’émotion suscitée par ces drames avait été à la hauteur de leur monstruosité, et, à l’Etranger comme en France, une large majorité de ceux qui sont attachés à la démocratie, sans laquelle aucun Humanisme ne peut exister ni survivre, étaient devenus Charlie, sans forcément partager pour autant la philosophie et les choix éditoriaux du journal : par principe, pour le respect de valeurs qui dépassent l’appartenance politique ou la croyance religieuse, parce que rien n’est plus important que le respect de la vie, celle de l’Homme bien sûr, mais aussi celle de tout ce qui, autour de nous, peut aider à construire un monde respectueux et respectable.
J’ai pour ma part été très touché par l’assassinat des dessinateurs de Charlie Hebdo, sans doute parce que la mort de Cabu me renvoyait à ce temps, déjà lointain et pourtant si proche encore, où, chaque jeudi, accompagnant ma mère quand elle allait faire ses courses au marché du Bourg, j’achetais le numéro de Pilote où j’allais retrouver Astérix, le Pilotorama de la semaine, le Petit Nicolas et… le Grand Duduche, ce doux fêlé, naïf et dégingandé, auquel je m’identifiais sans doute un peu.
Que de rêves brisés depuis, au cours des dernières années en particulier ! La disparition de Cabu, je l’ai compris sitôt la nouvelle répandue dans les médias, fut pour moi une deuxième mort : la confirmation que, dans notre Société, il n’y a pas de place pour l’homme libre, l’anticonformiste, le Grand Duduche… C’est donc naturellement, comme pour conjurer un mauvais sort, que j’ai rédigé d’une seule traite, à chaud, le texte qui suit, hommage évidemment aux victimes, à toutes les victimes, mais surtout hymne à la vie et encouragement à se battre pour défendre tout ce que notre Société a de meilleur.
Je n’avais pas envisagé de le publier. Je le pouvais d’autant moins que mon site était en panne.
Les choses ont changé aujourd’hui, sur ce seul plan.
La barbarie demeure : elle s’étend même, comme viennent de le montrer une fois de plus la sinistre mise à mort d’un Entrepreneur lyonnais et la chasse aux touristes occidentaux sur une plage de Sousse en Tunisie, qui ne sont que les derniers épisodes d’une longue série d’actes odieux perpétrés partout dans le monde au nom d’une vision dévoyée et abjecte de la religion.
Après y avoir bien réfléchi, je pense que mon texte d’après Charlie peut trouver sa place sur le site d’epHYGIE, à la fois hommage à ceux dont la vie a été volée et invitation à ne pas baisser les bras, à résister contre toutes les atteintes à la liberté, contre toutes les violences, qui ne se résument pas aux macabres exploits d’une poignée de fanatiques fascinés par le pouvoir qu’engendre la possibilité de donner la mort, mais touchent quotidiennement des millions d’hommes et de femmes blessés ou détruits sciemment, parce qu’ils dérangent en remettant en cause ou en faisant simplement obstacle à l’ordre établi.
Gabriel Paillereau
Copyright epHYGIE 29 juin 2015
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Je suis, tu es, vous êtes, nous sommes…
Je suis, tu es, vous êtes, nous sommes Charlie,
Je suis, tu es, vous êtes, nous sommes Juifs,
Je suis, tu es, vous êtes, nous sommes Gardiens de la Paix,
Je suis, tu es, vous êtes, nous sommes Chrétiens,
Je suis, tu es, vous êtes, nous sommes Musulmans,
Je suis, tu es, vous êtes, nous sommes de toutes les Couleurs,
Je suis, tu es, vous êtes, nous sommes Frères,
Il est, ils sont l’Ignorance, nous sommes le Savoir,
Il est, ils sont l’Esclavage, nous sommes la Liberté,
Il est, ils sont le Mensonge, nous sommes la Vérité,
Il est, ils sont l’Obscurité, nous sommes la Lumière,
Il est, ils sont la Guerre, nous sommes la Paix,
Il est, ils sont la Haine, nous sommes l’Amour,
Il est, ils sont le Passé, nous sommes l’Avenir,
Nous sommes des Hommes, simplement.
Gabriel Paillereau
Copyright epHYGIE 8 janvier 2015
Photographie GP
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