Peut-on accepter d’abandonner les travailleurs malades au bord de la route ? (Communiqué n° 31 du Groupement SLMT)

Peut-on accepter d’abandonner les travailleurs malades au bord de la route ?

C’est cette question à l’énoncé brutal qu’aborde le Communiqué n° 31 du Groupement Sauvons la Médecine du travail (SLMT), aujourd’hui privé des conseils précieux du Docteur André Causse, disparu au mois de janvier.

Le Groupement n’a manifestement rien perdu de sa combativité. A travers un exposé particulièrement documenté, il montre crûment les limites de la Santé au travail quand les Médecins du travail ont à se prononcer sur l’aptitude des salariés les plus âgés, en s’appuyant sur la visite de pré-reprise « organisée par le médecin du travail à l’initiative du médecin traitant, du médecin conseil des organismes de sécurité sociale ou du salarié » (Article R.4624-20 du Code du travail).

Comme le souligne le SLMT, la Circulaire du 9 novembre 2012 en rajoute en précisant : « Un examen de pré-reprise est obligatoirement organisé pour le salarié placé en arrêt de travail d’une durée de plus de 3 mois ».

D’où l’appréciation qui suit, sans ambiguïté : « Cette visite, bien que dépourvue de tout fondement légal, s’applique obligatoirement par voie de Circulaire. Le médecin conseil qui repère le malade sur le simple critère de la durée de son arrêt, le convoque et organise par là-même son licenciement express. »

La conclusion de l’étude est sans appel :

« Entre les plans sociaux qui multiplient les licenciements, y compris ceux des plus fragiles, les avis d’inaptitude sans maintien dans l’emploi des plus de 50 ans et les licenciements express des malades, les médecins du travail doivent-ils se résoudre à regarder passer « les futurs laissés pour compte». Ceux qui dans 3 ans se retrouveront sans ressources et sans solutions, travailleurs malades, sans emploi, pas encore retraités et inemployables. »

Une lecture à méditer alors que viennent tout juste d’être publiées les dernières statistiques du chômage, qui mettent précisément en évidence la progression catastrophique du chômage des « seniors » (au-delà de 50 ans !)…

Gabriel Paillereau
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3 Comments

Michel Blaizot

Réflexion du groupement SLMT, à bien des égards frappée au coin du bon sens.
Et, cependant, si la visite de pré-reprise a une utilité pour le maintien dans l’emploi, ce que je crois, on ne peut que se réjouir qu’elle soit rendue obligatoire après trois mois d’arrêt.
Par ailleurs, il faudrait savoir si les médecins-conseil de SS demandent davantage ces pré-reprises depuis la réforme de 2011/2012 ?
Enfin, où les auteurs ont-ils vu « la disparition des visites périodiques en 2019 » (sic) ? Sans doute s’agit-il d’une prévision de mauvais augure, mais pas invraisemblable.

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doc.Bedel

OUI, les médecins-conseil demandent beaucoup plus de visites de préreprise.
De plus, ils ont des objectifs quantitatifs avec prime à la clé.
Et comme ils ont désormais un « guide des durées d’arrêt de travail » en fonction des pathologies, ces injonctions de visites de préreprise précèdent de peu la consolidation et l’obligation de reprise du travail.

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g.paillereau

Je tiens à remercier les auteurs des deux commentaires pour la clarté de leur propos et j’invite naturellement tous ceux que ce thème inspire à ajouter leur propre contribution.
Pour ma part, je ne conteste pas le caractère potentiellement bénéfique des examens de pré-reprise, pour lesquels j’ai toujours plaidé, notamment auprès de Monsieur Gosselin, lorsqu’il préparait son rapport sur l’aptitude.
Ce que je déplore en revanche, c’est « l’habillage administratif » qui lui a été donné (dont le SLMT rend parfaitement compte dans sa réflexion), qui, de mon point de vue, dévoie le système et peut effectivement être à l’origine de dégâts importants pour des salariés fragiles qu’il est censé aider.
Il serait effectivement très intéressant, comme le souligne Michel Blaizot, de connaître l’évolution du nombre d’examens de pré-reprise demandés par les Médecins-Conseil de la Sécurité sociale et… leur issue.
D’une façon générale, je trouve le thème abordé par le Groupement SLMT particulièrement pertinent eu égard à l’évolution de l’emploi (ou plutôt du non-emploi – ou de la mise sur la touche !) des salariés les plus âgés et au fait que demain, en contradiction totale avec ce dramatique constat, on exigera de tous un nombre d’années d’activité supérieur (et de plus en plus souvent inaccessible, avec ou sans prise en compte de la pénibilité), pour qu’ils puissent prétendre bénéficier d’une retraite à taux plein…
Autant dire que, si rien n’est fait pour contrer cette évolution, et si, de surcroît, on « laisse filer » le nombre de Médecins du travail (ce qui pourrait conduire à terme à une diminution drastique des examens périodiques), seule une minorité de salariés pourra bénéficier d’une retraite décente, la plupart d’entre eux étant condamnés à survivre tant bien que mal d’indemnités de toutes sortes et non d’un salaire, en raison de leur départ prématuré du monde du travail…

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