J’avais, dans mon précédent article, fait un « arrêt sur image » après le retrait, dans le cadre de la Commission des Affaires sociales, par Michel Issindou en personne, des amendements qu’il avait proposés en complément de ceux, présentés à la hâte et adoptés dans la foulée lors de la première lecture du projet de loi relatif au Dialogue social et à l’Emploi. J’avais, comme tous les observateurs, sur la foi des propos tenus par le Président et le Rapporteur, admis que ces amendements seraient examinés directement en séance.
Il n’en a rien été finalement puisque, en application de la règle dite « de l’entonnoir » (qui veut qu’au cours de la navette entre Assemblée nationale et Sénat, le débat ne porte plus que sur les dispositions pour lesquelles un accord n’est pas déjà intervenu), les amendements en question ont été supprimés. C’est en tout cas l’explication qu’a donnée François Rebsamen, semblant regretter qu’on en ait fait une application particulièrement stricte (on pourra lire l’extrait du discours (relatif à la Santé au travail) qu’il a prononcé à l’ouverture des débats de l’Assemblée Nationale sur le projet de loi relatif au Dialogue social et à l’Emploi, à partir du lien donné en bas de page).
Est-ce la raison exacte ? On ne le saura probablement jamais. On est néanmoins en droit de penser qu’elle se situe plutôt du côté de l’opposition extrêmement forte exercée par les Partenaires sociaux siégeant au COCT, le CNOM et bien d’autres encore, qui rendait très périlleuse l’adoption de ces amendements, également contestée avec vigueur « de l’intérieur » (si l’on peut dire) par les arguments incisifs de Gérard Sébaoun, un des rares Députés à avoir pris la mesure des atteintes prévisibles à la Santé au travail induites par les « amendements Issindou/Sirugue/Rebsamen ».
L’entonnoir se sera donc révélé être une sacrée « roue de secours », permettant au Ministre de sortir sans déshonneur d’un débat particulièrement mal engagé…
Du coup, le débat sur les quelques amendements restants a été très rapide, rares ayant été les Députés à s’attarder dans l’hémicycle et plus rares encore ceux qui se sont exprimés ! Un débat sans surprise où les amendements soutenus par le Rapporteur et le Ministre ont tous été adoptés et les autres (parmi lesquels la suppression de l’article 19 dans sa totalité) systématiquement rejetés (à une exception près).
La messe est donc dite et ce sont, conformément au vœu que j’avais formulé il y a quelques jours, les Partenaires sociaux siégeant au COCT qui vont travailler à l’élaboration de la future réforme du système. On ne peut que s’en féliciter a priori mais notre satisfaction doit être tempérée en raison précisément des premiers amendements de Michel Issindou. Censés aider à construire l’avenir, ne risquent-ils pas au contraire de constituer des obstacles à une réflexion totalement libérée ?
Est ainsi posée crûment la question de la responsabilité des Pouvoirs publics, qui, par leur maladresse, en ne prenant pas leurs opposants au sérieux, ont transformé en repoussoir un Rapport qui aurait pu être un premier jalon sur la voie de la refondation du système.
La seule solution pour en sortir est aujourd’hui la censure du Conseil Constitutionnel, dont il faut espérer qu’un nombre suffisant de Députés aura le courage de le saisir, pour que soient annulées les dispositions de l’article 19, ce qui ouvrirait la voie à un véritable Dialogue, ce Dialogue qui, paradoxalement, n’a pas existé par la faute d’un projet de loi sur… le Dialogue social !
Gabriel Paillereau
Copyright epHYGIE 9 juillet 2015
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On pourra accéder au compte rendu intégral de la séance, à l’extrait concernant l’article 19 et au discours de François Rebsamen à l’ouverture des débats, à partir des liens suivants :
Deuxième séance débats AN du mardi 07 juillet 2015 : compte rendu intégral
Deuxième séance débats AN du mardi 07 juillet 2015 : extrait du compte rendu (article 19)
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